Pour que le dialogue sincère entre les hommes et les femmes de différentes religions porte des fruits de paix et de justice.
[…]
« La vraie liberté religieuse a horreur des tentations de l’intolérance et du sectarisme et promeut des attitudes de dialogue respectueux et constructif » (ibid.). Nous ne pouvons pas ne pas reconnaître combien l’intolérance envers celui qui a des convictions religieuses différentes des siennes propres est un ennemi particulièrement insidieux, qui malheureusement se manifeste aujourd’hui en différentes régions du monde. En tant que croyants, nous devons être particulièrement vigilants pour que la religiosité et l’éthique que nous vivons avec conviction et dont nous témoignons avec passion s’exprime toujours par des attitudes dignes du mystère que l’on entend honorer, en refusant avec résolution comme non vraies, parce que non dignes de Dieu ni de l’homme, toutes ces formes qui représentent un usage déformé de la religion. La religion authentique est source de paix et non de violence ! Personne ne peut utiliser le nom de Dieu pour commettre de la violence ! Tuer au nom de Dieu est un grand sacrilège ! Discriminer au nom de Dieu est inhumain.
De ce point de vue, la liberté religieuse n’est pas un droit qui puisse être garanti uniquement par le système législatif en vigueur, qui est aussi nécessaire : c’est un espace commun – comme celui-ci – , une atmosphère de respect et de collaboration qui est construit avec la participation de tous, même de ceux qui n’ont aucune conviction religieuse. Je me permets d’indiquer deux attitudes qui peuvent être d’une utilité particulière dans la promotion de cette liberté fondamentale.
La première, c’est celle de voir en tout homme et en toute femme, même en ceux qui n’appartiennent pas à sa propre tradition religieuse, non des rivaux, encore moins des ennemis, mais bien des frères et des sœurs. Celui qui est assuré de ses convictions propres n’a pas besoin de s’imposer, d’exercer des pressions sur l’autre : il sait que la vérité a sa force de rayonnement propre. Nous sommes tous, au fond, des pèlerins sur cette terre, et au cours de notre voyage, tandis que nous aspirons à la vérité et à l’éternité, nous ne vivons pas comme des entités autonomes et autosuffisantes, ni comme des individus ni comme des groupes nationaux, culturels ou religieux, mais nous dépendons les uns des autres, nous sommes confiés aux soins les uns des autres. Chaque tradition religieuse, à l’intérieur d’elle-même, doit réussir à rendre compte de l’existence de l’autre.
Une seconde attitude est l’engagement en faveur du bien commun. Chaque fois que l’adhésion à sa propre tradition religieuse fait germer un service plus convaincu, plus généreux, plus désintéressé pour la société tout entière, il y a un exercice authentique et un développement de la liberté religieuse. Celle-ci apparaît alors non seulement comme un espace d’autonomie légitimement revendiquée, mais comme une potentialité qui enrichit la famille humaine par son exercice progressif. Plus on est au service des autres, et plus on est libre!
Regardons autour de nous : combien sont nombreux les besoins des pauvres, combien nos sociétés doivent encore trouver des chemins vers une justice sociale plus répandue, vers un développement économique inclusif ! Combien l’âme humaine a besoin de ne pas perdre de vue le sens profond des expériences de la vie et de récupérer l’espérance ! Dans ces domaines d’action, les hommes et des femmes inspirés par les valeurs de leur propre tradition religieuse peuvent offrir une contribution importante, même irremplaçable. C’est là aussi un terrain particulièrement fécond pour le dialogue interreligieux.
Et puis, je voudrais évoquer une chose qui est toujours un fantasme : le relativisme, “tout est relatif”. À ce sujet, nous devons avoir présent à l’esprit un principe clair : on ne peut dialoguer si on ne part pas de sa propre identité. Sans identité, le dialogue ne peut exister. Ce serait un dialogue fantôme, un dialogue en l’air : il ne sert pas. Chacun de nous a sa propre identité religieuse, est fidèle à elle. Mais le Seigneur sait comment poursuivre l’histoire. Partons chacun de notre propre identité, ne faisons pas semblant d’en avoir une autre, parce que cela ne sert à rien et n’aide pas et c’est du relativisme. Ce qui nous rapproche c’est la route de la vie ; c’est la bonne volonté de partir de sa propre identité pour faire du bien aux frères et aux sœurs. Faire du bien ! Et ainsi, comme frères nous marchons ensemble. Chacun de nous offre le témoignage de sa propre identité à l’autre et dialogue avec l’autre. Puis le dialogue peut aller plus avant sur des questions théologiques, mais ce qui est plus important et beau, c’est de marcher ensemble sans trahir sa propre identité, sans la masquer, sans hypocrisie. Cela me fait du bien de penser cela. […]
RENCONTRE AVEC LES RESPONSABLES DES DIVERSES CONFESSIONS RELIGIEUSES PAPE FRANÇOIS
21 septembre 2014
Texte intégral:
http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/speeches/2014/september/documents/papa‐ francesco_20140921_albania‐leaders‐altre‐religioni.html
© Copyright 2014 ‐ Libreria Editrice Vaticana
COMMENTAIRE
Comment nouer le dialogue
Le dialogue se noue à travers l’humilité, même au prix d’« avaler des couleuvres », parce qu’il ne faut pas laisser grandir dans notre cœur « des murs » de ressentiment et de haine. Ce sont les mots du Pape François lors de la Messe célébrée en la mémoire liturgique de saint François de Sales. Le point de départ de l’homélie a été le passage du premier livre de Samuel (24, 3-21), qui raconte la confrontation entre Saul et David. « Hier — a rappelé le Pape — nous avons entendu la parole de Dieu » qui nous faisait voir ce que fait la jalousie, ce que fait l’envie dans les familles, dans les communautés chrétiennes ». Ce sont des attitudes négatives qui « conduisent toujours à de nombreuses disputes, aux divisions. Voire à la haine ». Et « cette histoire nous l’avons vue dans le cœur de Saul contre David : il éprouvait cette jalousie » au point « qu’il voulait le tuer ». Mais « aujourd’hui — a-t-il poursuivi — la parole de Dieu nous fait voir une autre attitude : celle de David ». Qui « savait très bien » qu’il était « en danger ; il savait que le roi voulait le tuer. Et il s’est trouvé dans la situation de pouvoir tuer le roi : et cela aurait été la fin de l’histoire ». Pourtant « il a choisi une autre voie » ; il a préféré « la voie du rapprochement, pour éclaircir la situation, s’expliquer. La voie du dialogue pour faire la paix ». En revanche le roi Saul « ruminait dans son cœur cette amertume », il insultait « David parce qu’il croyait qu’il était son ennemi. Et celle-ci grandissait dans son cœur ». Malheureusement, a affirmé le Pape, « ces pensées grandissent toujours lorsque nous les écoutons, à l’intérieur de nous. Et elles forment un mur qui nous éloigne de l’autre personne ». Ainsi finissons-nous par rester « isolés dans ce bouillon amer de notre ressentiment ». « Humilité, douceur et se faire tout pour tous » sont les trois éléments de base du dialogue. Mais — a précisé le Saint-Père — même si « ce n’est pas écrit dans la Bible, nous savons tous que pour faire ces choses-là, il faut avaler beaucoup de couleuvres : nous devons le faire parce que c’est ainsi qu’on fait la paix ! ». On fait la paix « avec l’humilité, l’humiliation ». Il faut la disponibilité à reconnaître face à l’autre : « Écoute, excuse-moi, moi j’ai cru cela… ». La juste attitude est « s’humilier : il est toujours bon de faire le pont, toujours, toujours ! ». Tel est le style de qui veut « être chrétien » ; même si, a admis le Pape, « Ce n’est pas facile, pas facile ! ».
MÉDITATION MATINALE PAPE FRANÇOIS
24 janvier 2014
Texte intégral:
http://m2.vatican.va/content/francesco/it/cotidie/2014/documents/papa‐francesco‐ cotidie_20140124_costruire‐il‐dialogo.html
© Copyright 2014 ‐ Libreria Editrice Vaticana